La tempête qui secoue l’industrie automobile européenne
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L’industrie automobile de l’Union européenne (UE) traverse une crise sans précédent, marquée par une chute des ventes, une transition chaotique vers l’électrique et une concurrence chinoise de plus en plus agressive. Ces facteurs combinés mettent en péril l’avenir même de ce secteur emblématique.
Restructurations en série
Depuis l’été dernier, les annonces de restructurations se multiplient à un rythme alarmant. Fermetures d’usines, chômage technique et suppressions d’emplois se succèdent à travers l’Europe. L’Allemagne, pilier historique de l’automobile, subit les plus lourdes conséquences. Volkswagen prévoit la fermeture de trois sites et la suppression de dizaines de milliers de postes. Les grands équipementiers tels que Bosch, Valeo, Michelin, Continental ou encore Schaeffler sont eux aussi frappés de plein fouet. Même STMicroelectronics, spécialiste des puces électroniques, souffre de la baisse des ventes de voitures électriques. L’industrie européenne fait face à une des plus graves crises de son histoire.
Des ventes en perte de vitesse
Initialement, le recul des ventes de véhicules neufs avait été attribué aux perturbations des chaînes d’approvisionnement causées par la pandémie. Cependant, la situation reste morose malgré des signes épars de reprise. Les chiffres de l’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA) montrent une légère augmentation des ventes en octobre 2024 par rapport à l’année précédente. Mais cette progression cache de fortes disparités : -11 % en France, +6 % en Allemagne, -9,1 % en Italie. Les données de septembre étaient encore plus alarmantes, avec des baisses de -11,1 % en France et -10,7 % en Italie.
Seul le segment des hybrides semble tirer son épingle du jeu, grâce à son attrait combinant motorisation thermique et électrique. Toutefois, l’absence d’une définition claire et uniforme du terme « hybride » suscite des interrogations.
Une électrification laborieuse
Sous l’impulsion de la Commission européenne, l’UE s’est engagée à limiter les émissions de CO2 par véhicule, avec une interdiction programmée des ventes de voitures thermiques neuves d’ici 2035, sauf exceptions. Si cet objectif environnemental est louable, il s’accompagne de nombreux défis. La fabrication des véhicules électriques reste tributaire des terres rares, principalement fournies par la Chine, et le recyclage des batteries représente un enjeu écologique majeur. Par ailleurs, l’insuffisance criante des infrastructures, notamment en termes de bornes de recharge et d’usines de production de batteries, ralentit la transition.
De plus, le passage au tout électrique, bien qu’inéluctable, réduira nécessairement les besoins en main-d’œuvre. En Allemagne et en France, la baisse des subventions publiques a également freiné les ventes de véhicules électriques. Ces modèles restent onéreux, principalement en raison du coût élevé des batteries performantes. Les constructeurs européens, en misant sur le haut de gamme pour dégager des marges rapides, ont laissé un vide sur le marché des modèles abordables, un segment dans lequel les fabricants chinois s’imposent de plus en plus.
L’offensive chinoise
Les constructeurs chinois profitent de leur avance dans le développement des véhicules électriques de moyenne gamme pour conquérir le marché européen. Avec des marques comme BYD, MG ou Zeekr, ils proposent des modèles de qualité à des prix nettement inférieurs à ceux des constructeurs européens. Ces succès reposent sur des chaînes de production très efficaces et largement subventionnées par le gouvernement chinois.
Pour contrer cette concurrence jugée déloyale, l’UE a instauré un droit compensateur sur les importations de véhicules électriques chinois, équivalent au montant des aides publiques perçues par ces constructeurs. Cependant, cette mesure semble insuffisante face à la compétitivité des modèles chinois et à la réalité du pouvoir d’achat des Européens, érodé par l’inflation.
Une crise aux implications sociales majeures
Au-delà des enjeux économiques et environnementaux, cette crise met en lumière un véritable drame social. Des milliers d’emplois sont en jeu, et la réorientation de l’industrie vers l’électrique risque d’accentuer les disparités. L’UE mesure-t-elle pleinement les conséquences sociales de cette transformation ?