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Emploi public ou croissance, faut-il choisir ?

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Emploi public ou croissance, faut-il choisir ?

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Dans un tweet de soutien aux agents grévistes de l’Éducation nationale, le fondateur de Mediapart Edwy Plenel défend la valeur des emplois publics, prenant pour cible Bernard Arnault, le président de LVMH. Ce dernier avait déclaré dans une interview de 2016 que «les vrais emplois (…) sont des emplois marchands du secteur des entreprises, (…) les seuls à même de réduire le chômage et améliorer le pouvoir d’achat global du pays». Qu’en est-il au regard de la situation comptable de la France ? 

Les emplois publics et la croissance

Depuis 1975, la France est en déficit constant. L’ Hexagone ne respecte plus depuis 2002 le traité européen de Maastricht de 1992, et la limite de dette publique de 60 % du PIB qu’il impose. La pandémie a aggravé la situation : alors que fin 2019, la dette publique française atteignait 97,6 % du PIB, elle s’élèverait aujourd’hui à 115,3 %. Le bilan comptable français devrait, par ailleurs, continuer de se détériorer dans un futur immédiat, puisque les autorités ont annoncé vouloir émettre 260 milliards d’euros de dettes publiques à moyen et long terme durant l’année 2022. 

L’État emploie aujourd’hui un très grand nombre de fonctionnaires. La dernière étude de l’INSEE dénombre 5,56 millions d’agents, hors contrats aidés, soit 84 fonctionnaires pour 1000 habitants. C’est une constante en France, puisque en 1980, le pays comptait déjà 83 agents pour 1000 habitants. Il existe cependant un biais : « le champ de la fonction publique ne comprend ni la Poste, ni les enseignants de l’enseignement privé sous contrat », rappelait, en 2003, le politologue Philippe Raynaud. On peut néanmoins estimer que la part de la masse salariale de l’État dans son budget est restée peu ou prou la même depuis 40 ans. 

Quel retour sur investissement ?

Depuis 1986, les vagues de privatisations ont touché un grand nombre de secteurs : Saint-Gobain, Paribas, TF1, la Société Générale, Havas, Matra, Suez, Renault, BNP, Elf-Aquitaine, Total et plus récemment la Française des jeux, Engie, certains aéroports et l’ensemble du réseau autoroutier. Ce dernier était pourtant assimilable à une « rente » selon la Cour des comptes, comme le rappelait François Ruffin à la tribune de l’Assemblée nationale le 13 janvier 2022. Le pays se sépare donc de ces actifs depuis 40 ans, conformément à l’idéal néo-libéral. Problématique pour un État en faillite. 

D’autant que ce dernier, grâce à l’héritage étatiste d’après-guerre, a toujours une place importante pour le marché intérieur français, même hors pandémie. En 2018, le poids des dépenses publiques dans le PIB atteignait ainsi 56 % selon l’INSEE, pour 1,8 % de croissance. Un retour sur investissement bien loin de celui des meilleures entreprises privées qui prospèrent depuis quelques années. D’ailleurs, « 71 des 100 premières “puissances économiques” au monde sont des entreprises, et seulement 29 des États » soulignait l’économiste Georges Nurdin en 2019. Des résultats que ces 71 structures ont « obtenus avec “seulement” quelques centaines de milliers de collaborateurs ». 

Les limites de l’emploi privé

L’État reste cependant le seul à pouvoir intervenir lorsque l’initiative privée est défaillante, auquel cas certains services, pourtant essentiels, ne pourraient être assurés au bénéfice des populations les plus fragiles. En effet, impossible pour les plus démunis d’accéder à une éducation correcte ou une couverture santé efficace par manque de rentabilité du service proposé. Impossible également de maintenir une surveillance sur certaines zones paupérisées, les résidents n’ayant pas les moyens de la payer. Impossible aussi de garantir une justice impartiale sans un tiers dépourvu d’intérêt économique. 

Il serait donc difficile pour l’État français de se séparer de toutes ses activités et de tout privatiser. En particulier donc, pour tout ce qui concerne les biens et services non marchands: l’éducation, la santé, la justice ou la police. La conception française de l’intérêt général ne le permet d’ailleurs pas, comme le rappelle régulièrement le Conseil constitutionnel. L’emploi public est par conséquent indispensable, mais ne saurait être la solution à la croissance française.

 

 

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