Le redressement fiscal de Google ternit le partenariat entre Waze et la SANEF
Partager
L’application mobile de navigation GPS Waze a annoncé le 18 février dernier avoir noué un partenariat avec la SANEF, gestionnaire d’autoroutes en France, qui devient ainsi le premier partenaire français de Waze dans le cadre du programme Connected Citizens. Un choix qui est loin de faire consensus, puisque dans le même temps on apprenait que Google, propriétaire de l’application depuis 2013, risquait un redressement fiscal d’1,6 milliard d’euros pour arriérés d’impôts en France.
Waze est une application connue des automobilistes, qui sont de plus en plus nombreux à la plébisciter. Elle présente la particularité d’être collaborative puisqu’elle fonctionne grâce à sa communauté d’utilisateurs (les wazers) qui partagent en temps réel des informations censées faciliter la conduite (accidents, radars, ralentissements…) et réduire les temps de trajet (aide au contournement des bouchons…). Si la firme revendique aujourd’hui plus de 50 millions d’utilisateurs dans le monde, dont 3 millions en France, elle ne compte pas s’arrêter là.
La SANEF rejoint Vince autoroutes
La plateforme a décidé de renforcer son service en nouant un partenariat avec un concessionnaire d’autoroute français dans le cadre de son programme « Connected Citizens ». Dès cet été, la SANEF (société des autoroutes du Nord et de l’Est de la France) va en effet partager avec Waze les données relatives à l’état du trafic autoroutier des axes qu’elle exploite, et ce grâce aux informations collectées par ses capteurs et ses caméras. En contrepartie du service fourni, la société concessionnaire d’autoroute pourra également bénéficier des informations renseignées par les wazers eux-mêmes. Elle disposera donc d’un outil supplémentaire pour compléter ses informations relatives au trafic en temps réel, et renforcera ainsi la rapidité et la précision de ses interventions en cas d’incidents.
Avant la SANEF, Vinci Autoroutes, premier opérateur d’autoroutes en Europe, s’était également associé à Waze, en 2015, pour proposer aux automobilistes une information trafic plus riche, interactive et sociale. Si la radio d’autoroute, concept créé dans les années 1980 par la filiale du groupe de concession et de construction, reste le vecteur principal de la transmission de l’information aux quelque 2,2 millions de clients journaliers, elle pourra donc s’appuyer sur la dynamique participative de l’application.
Une société-mère qui joue avec les règles fiscales nationales
Si la démarche est louable, elle n’est pas sans faire grincer des dents. Une ombre est apparue récemment au tableau : les accusations de fraude fiscale qui pèsent sur la société Google, propriétaire de l’application Waze depuis 2013. L’entreprise californienne est en effet régulièrement accusée d’être la championne de cette pratique qui consiste à minimiser son chiffre d’affaires pour réduire sa contribution fiscale. On apprenait, le 24 février dernier d’une source proche du dossier, que le fisc français réclame notamment 1,6 milliard d’euros d’impayés au géant de l’Internet.
La France n’est d’ailleurs pas le seul pays membres de l’Union européenne (UE) à subir la fraude fiscale de la firme californienne – qui parle plutôt d’ « optimisation fiscale ». En Italie, le fisc lui aurait réclamé quelque 200 millions d’euros au début de l’année ; Google a également accepté de verser plus de 170 millions d’euros au Royaume-Uni pour couvrir ses arriérés d’impôts sur les dix dernières années. De son côté, Michel Sapin, le ministre français des finances, a déclaré début février que la France n’était « pas dans une logique de négociation » mais plutôt dans « une logique de mise en œuvre des règles applicables ». Sous-entendu : Google déboursera la totalité de ce qu’il doit au fisc français.
Seulement il semblerait que le mal soit déjà fait. En s’associant avec une firme dont la société-mère joue avec les règles fiscales nationales, la SANEF – comme Vinci – risque de ternir son image, alors que les sociétés d’autoroutes, gérant des biens publics, sont déjà largement critiquées par les usagers pour leurs hausses répétées du prix des péages. Les dirigeants de la société concessionnaire d’autoroutes pourront d’ailleurs difficilement prétendre qu’ils ignoraient l’existence du conflit entre Google et l’Etat français, celui-ci ayant notifié dès 2014 le redressement fiscal dont fait aujourd’hui l’objet l’entreprise américaine.